La guerre sans État ? Fragmentation du conflit et retour à l’autodéfense
Dans un entretien accordé à TV Libertés, Bernard Wicht examine la transformation des formes de guerre dans un contexte de retrait étatique. L’entretien peut être visionné ici : voir la vidéo.
Il y développe la thèse selon laquelle la guerre se dissocie progressivement de l’État. Reprenant la formule de Charles Tilly — « la guerre fait l’État et l’État fait la guerre » —, il montre que le désengagement ou l’effondrement de l’autorité centrale engendre des conflits décentralisés : insurrections, actions terroristes, bandes armées. Cette dynamique s’appuie sur le cadre théorique de Joseph Tainter, selon lequel l’augmentation de la complexité institutionnelle finit par provoquer une rupture du système.
Wicht observe également la montée du mercenariat et des sociétés militaires privées, qu’il interprète comme un symptôme de la « libéralisation de la défense ». L’État perd son monopole sur la violence légitime au profit d’acteurs dispersés, autonomes, difficilement contrôlables.
Il note enfin que les jeunes générations ne s’identifient plus à l’armée ni à l’État, mais rejoignent des structures marginales, souvent informelles. Ce phénomène traduit une érosion du sentiment d’appartenance collective, au profit de formes d’autodéfense fragmentées.
Ces réflexions s’inscrivent dans la continuité de son dernier ouvrage, Guerre en Europe : Gangs contre Milices privées (Wicht, 2025), dans lequel il explore cette évolution vers une conflictualité post-étatique.